233 : Diabète sucré de type 1 et 2 de l’enfant et de l’adulte. Complications

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Objectifs

  • Diagnostiquer un diabète chez l’enfant et chez l’adulte
  • Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge
  • Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
  • Décrire les principes de la prise en charge au long cours

Définitions

  • Glycémie :
    • Normale à jeun < 1,10 g/L
    • Hyperglycémie modérée à jeun : 1,10 - 1,26 g/L
    • Diabète sucré :
      • Glycémie à jeun ≥ 1,26 g/L à 2 reprises
      • Ou glycémie aléatoire ≥ 2 g/L et signes cliniques d'hyperglycémie
Caractéristiques Type I Type 2
ATCD familiaux du même type Rares Fréquents
Age de survenue < 35 ans > 35 ans
Début Rapide, explosif Lent, insidieux
Facteur déclenchant Souvent présent
Symptomatologie Bruyante Pauvre/absente
Poids Normal ou maigre Obésité abdominale
Hyperglycémie au diagnostic > 3 g/L < 2 g/L
Cétose Fréquente Rare
Complications au moment du diagnostic Absentes 50% des cas
Cause de mortalité Insuffisance rénale Maladies cardiovasculaires

Diabète de type 1

  • Prévalence : 200 000 en France, gradient Nord/Sud
  • Survient avant 35 ans (adolescence +++)
  • Augmentation régulière de l'incidence
  • Sex-ratio = 1

Physiopathologie

  • Carence absolue en insuline due à la destruction des cellules β-pancréatiques
  • 2 sous-types :
    • Diabète type 1 auto-immun (90%) : diabète type 1 classique + LADA (Latent Autoimmune Diabetes in Adult)
    • Diabète type 1 idiopathique (absence d'auto-anticorps) : diabètes cétosiques du sujet noir, diabètes suraigus japonais

Prédisposition génétique

  • Toujours présente, mais pas d'ATCD familiaux dans 85% des cas
  • Principaux gènes concernés : Ag de classe 2 type HLA (existe également HLA protecteurs)
  • Nombreux gènes impliqués : éléments variables du gène de l'insuline, gène e la protéine CTLA-4, gène PTP-N22

Facteurs environnementaux

  • Facteurs génétiques ne suffisent pas à expliquer l'étiopathogénie (50% d'atteinte commune chez les jumeaux homozygotes)
  • Nombreux virus suspectés (coxsackie, CMV, rubéole, oreillons)
  • Différence importante avec les facteurs précipitant le diagnostic : grippe, stress...
  • Théorie hygiéniste

Processus auto-immun

  • Principaux antigènes :
    • Insuline et pro-insuline
    • GAD (Glutamic Acid Decarboxylase)
    • IA2 (islet antigen 2)
  • Insulite auto-immune avec destruction des cellules β par les lymphocytes cytotoxiques
  • Anticorps détectables au diagnostic :
    • ICA : anticorps anti-îlots
    • Anti-GAD
    • Anti-IA2
    • Anti-insuline
  • Fréquence des autres pathologies auto-immunes associées → polyendocrinopathies auto-immunes type 1 et 2

Diagnostic

Présentation clinique initiale

  • Début rapide ou explosif
  • Syndrome cardinal : polyuro-polydipsie, amaigrissement, polyphagie
  • Troubles visuels transitoires : jours qui suivent le début de l'insulinothérapie +++
  • Fonte musculaire (quadriceps), rarement hépatomégalie
  • Dyspnée de Kusmall = acidose
  • Glycémie veineuse très élevée
  • Glycosurie + cétonurie
  • Révélation par une acidocétose inaugurale

Formes cliniques

  • LADA ou diabète type 1 lent :
    • Début tardif et progressif proche du type 2
    • Anticorps positifs (anti-GAD +++)
    • Insulinothérapie nécessaire en 2 à 10 ans
  • Diabète cétosique de l'Africain :
    • Début par décompensation cétosique suivie d'une possibilité d'arrêt de l'insuline dans 50% des cas après la phase aiguë
    • Possibilité de répétition des épisodes de cétose avec rémission
    • Anticorps négatifs
  • Diagnostic tardif au stade de coma acidocétosique
  • Lune de miel : période suivant le diagnostic du diabète type 1 : équilibre avec doses faibles d'insuline, parfois arrêt

Confirmation diagnostique

  • Diagnostic clinique : maigreur + cétose + âge < 35 ans
  • Paramètres immunologiques (si triade incomplète) : auto-anticorps ± typage HLA
  • Si marqueurs immunologiques négatifs → éliminer d'autres formes de diabète proches du DT1 :
    • Diabètes génétiques monogéniques : MODY, mutation du gène de l'insuline, diabètes mitochondriaux, syndrome de Wolfram (diabète insipide, diabète sucré, atrophie optique, surdité)
    • Diabètes secondaires : pancréatite chronique, pancréatectomie totale, cancer du pancréas, hémochromatose, mucoviscide
  • Diabète néonatal : apparition aiguë dans les 6 premiers mois, peut persister ou régresser et récidiver ; rechercher une origine non-autoimmune
  • Autres causes rares :
    • Inhibition fonctionnelle de l'insulinosécrétion : hypokaliémie, jeûne prolongé, phéochromocytome, somatostatinome
    • Glucagonome
    • Insulinorésistance primitive profonde
    • Insulinorésistance secondaire : hypercorticisme, acromégalie, hyperthyroïdie
  • Diabètes iatrogènes : corticoïdes, immunosuppresseurs, diurétiques hypokaliémiants, progestatifs de synthèse, salbutamol, antiprotéases du SIDA, pentamidine

Evolution

Histoire naturelle

  • Modèle d'Eisenbach :
    • Phase préclinique : destruction des cellules β par les processus immuns
    • Diagnostic clinique : destruction > 85%
    • Phase clinique séquellaire : disparition lente des cellules restantes
  • Etapes :
    • Prédisposition génétique
    • Insulite silencieuse
    • Diabète préclinique : signes métaboliques précoces, hyperglycémie
    • Diabète patent peptide C + : insulinodépendance
    • Diabète peptide C - : destruction totale des cellules β

Maladie chronique

  • Importante de l'acceptation de la maladie par le patient
  • Education : engagement permanent nécessaire du patient pour gérer le traitement et participer aux soins quotidiens
  • Freins à l'adhésion :
    • Peur des hypoglycémies
    • Peur de prendre du poids
    • Non-acceptation de la maladie
    • Refus des contraintes (adolescent +++)
    • Insulinothérapie inadaptée au mode de vie
    • Erreurs techniques : injections trop profondes/superficielles, lipodystrophie
    • Maladie surajoutée (infection +++)
  • Diabète instable :
    • Episodes itératifs de céto-acidoses ou hypoglycémies sévères
    • Facteurs psychologiques au premier plan

Prise en charge

Principes

  • Importance de l'éducation thérapeutique :
    • Transfert des connaissances par enseignement collectif ou individuel
    • Vérification des comportements et des acquis
    • Importance des consultations infirmières et diététiques
  • Définir des objectifs thérapeutiques personnalisés et acceptés :
    • Réduction du risque cardiovasculaire
    • Objectifs idéaux chez le diabétique type 1 non-âgé :
      • Glycémie le matin à jeun : 1-1,20 g/L
      • Glycémie préprandiale : 0,8-1,2
      • Glycémie post-prandiale (2h) : 1,2-1,8
      • Au coucher : 1,2
      • A 3h du matin : > 0,8
      • HbA1c ≤ 7%
      • Hypoglycémies : modérées < 5/semaine, pas d'hypoglycémie sévère
      • Autocontrôles : 3 à 6 par jour
      • 3 à 5 injections/j
  • Equilibre délicat de l'insulinothérapie :
    • Diminution des complications (rétinopathie, néphropathie, neuropathie, coronaropathie) avec ↓ HbA1c
    • Risque d'hypoglycémie sévère si insulinothérapie intensive
  • Chez l'enfant jeune et la personne âgée : objectif d'HbA1c plus laxiste

Autosurveillance

  • Buts :
    • Suivre le diabète
    • Adapter les doses
    • Avoir une idée de l'équilibre moyen
    • Gérer les situations d'urgence
  • ASG ≥ 4 ×/j : pré-prandial + coucher, de temps en temps post-prandial et à 3h du matin
  • Carnet d'autosurveillance

Surveillance

  • Hémoglobine glyquée :
    • HbA1c par méthode standardisée
    • Normale : 4-6%
    • Objectifs : ≤ 7%, 8% chez l'enfant et la personne âgée fragile, 8,5% avant 6 ans
    • Reflet de l'équilibre glycémique sur 3 mois : glycémie moyenne (g/L) = 1,5 + (HbA1c - 7)×0,3
    • Causes d'erreur de mesure : anémie hémolytique, urémie, hémoglobinopathie, traitement par EPO, saignées → fructosamine
  • Bilan métabolique annuel : EAL, créatinine, microalbuminurie, ECBU, ECG
  • Dépistage FO annuel
  • Consultation spécialisée tous les 3 à 4 mois

Insulinothérapie

  • Traitement principal, palliatif, à vie
  • Variétés :
    • Insuline recombinante : identique à l'insuline humaine
      • Insulines rapides : Actrapid, Insuman
      • Insulines ralenties : NPH, Ultraltard
    • Analogues de l'insuline : structure modifiée à but thérapeutique
      • Analogues rapides (juste avant le repas) : Humalogue, Novorapid
      • Analogues lents (1 à 2 fois par jour à heure fixe) : Lantus, Levemir
    • Parfois mélanges préconditionnés
  • Résorption cutanée dépend de la profondeur, de la zone, de la dose, de l'environnement thermique et de l'activité musculaire du membre concerné
  • 2 modes d'administration :
    • Stylos à insuline (réutilisables ou UU)
    • Pompes portables pour administration continue modulée : plus efficaces mais plus contraignantes et chères
  • Schémas :
    • Choix selon acceptation, autonomisation, objectifs thérapeutiques
    • Schéma basal-bolus : analogues lents couvrant le nycthémère + analogues rapides avant les repas
    • 4 injections : 3 rapides pré-prandiales, 1 lente pour couvrir la nuit
    • 3 injections : regroupement injection lente et rapide du soir
  • Doses en général < 1 UI/kg, à adapter en fonction des glycémies, de l'activité physique et de l'alimentation prévues
    • Education thérapeutique pour l'auto-gestion +++ (insulinothérapie fonctionnelle)
  • Effets secondaires :
    • Hypoglycémies
    • Prise de poids : +5 kg en moyenne
    • Allergie (rare)
    • Lipoatrophie d'origine immunologique
    • Lipohypertrophie si piqûre au même endroit

Traitement non-insulinique

  • Maladie chronique → suivi multidisciplinaire, consultation d'annonce, soutien et accompagnement
  • Alimentation variée sans interdit mais horaires et apports glucidiques réguliers
  • Exercice physique
  • Associations de patients

Cas particuliers

Diabète de l'enfant et de l'adolescent

  • Fréquence des acido-cétoses
  • Attention aux hypoglycémies sévères, surtout chez le jeune enfant
  • Diabète difficile à équilibrer : ↑ des besoins en insuline, acceptation difficile
  • Part croissante de diabète de type 2 chez les enfants obèses

Diabète chez la femme

  • Diabète gestationnel
  • Contraception : contre-indication aux estroprogestatifs et des progestatifs dérivés des norstéroïdes
  • Grossesse :
    • Pronostic normal si équilibre périconceptionnel parfait et jusqu'à l'accouchement
    • Utiliser des analogues de l'insuline ayant l'AMM chez la femme enceinte
    • Retentissement de la grossesse sur le diabète :
      • Baisse physiologique de l'HbA1c
      • ↑ des besoins en fin de grossesse, ↓ en post-partum
      • Risque d'aggravation de la rétinopathie et de la néphropathie si non-stabilisées
    • Contre-indication absolue : insuffisance coronaire
    • Objectifs glycémiques strictes, suivi rapproché spécialisé mensuel
  • Ménopause : éviter l'hormonothérapie substitutive percutanée

Personne âgée

  • Ne pas craindre l'insulinothérapie
  • Objectifs plus laxistes chez les personnes fragiles à haut risque hypoglycémique

Diabète et jeûne

  • Ne jamais arrêter l'insuline en cas d'intolérance alimentaire, essayer des collations liquides fractionnées ou administration de glucose IV
  • Vérifier la cétonurie et la cétonémie : troubles digestifs peuvent révéler une cétose
  • Hospitalisation systématique en cas de nécessité de jeûne > 1h avec perfusion glucosée et adaptation des doses d'insuline
  • Jeûne prolongé nécessaire : insuline IVSE + glucosé IV




Sources