220 : Adénome hypophysaire

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Objectifs

  • Diagnostiquer un adénome hypophysaire

Physiopathologie

  • Tumeurs bénignes développées aux dépens de l'hypophyse
  • 3 grands types de signes :
    • Syndrome tumoral
    • Syndrome d'hypersécrétion hormonale : hyperprolactinémie, acromégalie (GH), syndrome de Cushing (ACTH), hyperthyroïdie (TSH)
    • Syndrome d'insuffisance antéhypophysaire ou panhypopituitarisme
  • Souvent associés

Découverte devant un syndrome tumoral

Clinique

  • Céphalées rétro-orbitaires localisées
  • Troubles visuels :
    • Par compression des voies optiques (chiasma +++)
    • "Gêne" visuelle : impression de voile, difficulté à fixer un point...
    • Acuité visuelle en général normale sauf atteinte centrale sur lésion volumineuse négligée
    • Fond d’œil normal
    • Atteinte du champ visuel → Goldman ou périmétrie automatisée
      • Quadranopsie temporale supérieure
      • Voire hémianopsie bitemporale
      • Rarement : scotome, hémianopsie temporale supérieure, agrandissement de la tache de Mariotte...
  • Apoplexie hypophysaire :
    • Début brutal, céphalées violentes, syndrome méningé, paralysie oculomotrice, syndrome confusionnel, troubles visuels
    • Adénome en voie de nécrose ou d'hémorragie

Imagerie

IRM

  • Examen de référence
  • Microadénomes :
    • Image arrondie, homogène, hypoT1
    • T2 : souvent hyperintenses, parfois iso-/hypointenses
    • T1 Gd : se rehausse moins bien que le reste du parenchyme (hypointense)
    • Signes indirects :
      • Possible bombement du bord supérieur de l'hypophyse convexe
      • Déviation latérale de la tige pituitaire du côté opposé
      • Amincissement du plancher osseux de la selle en regard
    • Possibilité de clichés dynamiques pour mise en évidence de prise de contraste retardée
  • Macroadénomes :
    • Taille > 10 mm
    • T1 : isointenses
    • T1 Gd : hyperintenses
    • Analyse de l'extension : en haut vers le chiasma optique et le 3ème ventricule, en bas vers le sinus sphénoïdal, latéralement vers le sinus caverneux

Tomodensitométrie

  • Microadénomes :
    • Lésion intrasellaire < 10 mm
    • Signes directs : hypo-/isodense avant injection, hypodense à l'injection qui rehausse le parenchyme normal
    • Signes indirects :
      • Possible bombement du bord supérieur de l'hypophyse convexe
      • Déviation latérale de la tige pituitaire du côté opposé
      • Amincissement du plancher osseux de la selle en regard
  • Macroadénomes :
    • Adénomes > 10 mm agrandissant le volume de la selle turcique
    • Lésion isodense se rehaussant après injection pour devenir hyperdense
    • Mauvaise analyse des expansions latérales, supérieures et inférieures

Diagnostics différentiels

  • Etablis en imagerie
  • Craniopharyngiome intrasellaire :
    • Massé hétérogène, composantes multiples (tissu, kystes...)
    • T1 : hypo- ou hyperintense
    • T2 : association hypersignal et hyposignal
    • Calcifications vues en TDM
  • Méningiome intrasellaire :
    • Condensation anormale de l'os, TDM +++
    • Prise de contraste intense en IRM
    • Epaississement de la dure-mère en regard avec aspect spiculé
  • Autres : métastases, sarcoïdose, histiocytose, tuberculose, hypophysite auto-immune

Découverte devant un syndrome d'hypersécrétion

Hyperprolactinémie

  • Fréquente
  • Rechercher systématiquement une tumeur hypophysaire
  • Cause la plus fréquente : médicamenteuse

Signes d'appel

  • Chez la femme :
    • Galactorrhée : spontanée ou provoquée, liquide lactescent à distance du post-partum
    • Perturbations du cycle menstruel et infertilité :
      • Aménorrée ou oligoménorrhée précédée d'irrégularités et de spanioménorrhée
      • Par inhibition de la sécrétion de GnRH hypothalamique
      • Baisse de la libido voire dyspareunies
      • Parfois anovulation isolée
  • Chez l'homme :
    • Galactorrhée, gynécomastie
    • Troubles sexuels : ↓ libido, troubles de l'érection
    • Dosage de la PRL devant tout hypogonadisme
  • Dans les deux sexes : hypogonadisme → déminéralisation osseuse → risque d'ostéoporose

Démarche diagnostique

  1. Vérifier la véracité de l'hyperprolactinémie :
    • PRL > 20 ng/mL
    • Eliminer une fausse hyperprolactinémie par macroprolactinémie (agrégats de PRL perturbant le dosage)
    • Correction par chromatographie
  2. Eliminer une hyperprolactinémie non-thalamique :
    • Cause générale : grossesse (β-hCG), hypothyroïdie périphérique (TSH), insuffisance rénale chronique
    • Prise médicamenteuse : neuroleptiques, antidépresseurs (tricycliques et IMAO), métoclopramide, dompéridone, estrogènes, morphiniques, vérapamil, méthylDOPA
  3. Rechercher une lésion hypothalamo-hypophysaire → IRM hypophysaire :
    • Microadénome intrasellaire (< 10 mm) : souvent intra-hypophysaire, PRL entre 30 et 100 ng/mL
    • Tumeur volumineuse :
      • Rechercher une atteinte du chiasma optique → champ visuel et AV en urgence
      • PRL > 200 ng/mL : macroprolactinome
      • PRL < 200 ng/mL : peut être prolactinome ou tumeur non-prolactinique avec hyperprolactinémie de déconnexion
      • Distinction entre les 2 : traitement par agoniste dopaminergique → ↓ volume si prolactinome

Acromégalie

Syndrome dysmorphique

  • Extrémités : élargies, doigts épaissis, boudinés, peau de la paume et de la plante épaissie, changement de pointure, bagues trop petites
  • Visage : nez élargi, pommettes saillantes, front bombé, lèvres épaissies, rides marquées, prognathisme
  • Intérêt d'une comparaison aux photographies antérieures
  • Déformations squelettiques si acromégalie ancienne : cyphose dorsale, sternum projeté en avant, aspect de polichinelle

Signes fonctionnels et généraux

  • Signes fonctionnels :
    • Sueurs : nocturnes, malodorantes
    • Céphalées
    • Paresthésies des mains, syndrome du canal carpien secondaire
    • Douleurs articulaires
    • Asthénie voire syndrome dépressif
  • Signes généraux :
    • HTA
    • Ronflement, pauses respiratoires nocturnes, somnolence diurne

Complications

  • Cardiovasculaires :
    • Hypertrophie myocardique en échographie
    • Insuffisance cardiaque à fraction d'éjection conservée initialement, évolution vers IC congestive
    • Première cause de mortalité
  • Arthropathie acromégalique périphérique :
    • Grosses articulations : genoux, épaules, mains, poignets, hanche
    • Rythme mécanique, parfois inflammatoire
    • Radiographie : élargissement de l'interligne articulaire, ostéophytes exubérants, ossification des insertions tendineuses
  • Rhumatisme acromégalique (rachis) : lombalgies mécaniques, spondylose d'Erdheim à la radio (coulées ostéophytiques antérieures et latérales des corps vertébraux, concavité exagérée du mur postérieur)
  • Diabète ou intolérance ou glucose
  • Syndrome d'apnées du sommeil → polysomnographie, obstructive ou mixte
  • Goitre multinodulaire fréquent
  • Polypes du côlon → coloscopie régulière

Démarche diagnostique

  1. Affirmer l'hypersécrétion de GH :
    • IGF1 augmentée
    • Absence de freinage de la GH après HGPO (reste > 0,4 ng/mL/1 mUI/L)
  2. Triple bilan :
    • Bilan tumoral : imagerie pour rechercher microadénome ou macroadénome
    • Bilan du retentissement hypophysaire : recherche d'atteinte d'autres axes
    • Bilan du retentissement de l'acromégalie : échocardiographie, glycémie à jeun ± HGPO, radiographie des articulations, polysomnographie, coloscopie

Syndrome de Cushing

Diagnostic clinique

Anomalies morphologiques

  • Signes spécifiques :
    • Secondaires à l'effet catabolique des glucocorticoïdes
    • Amyotrophie des ceintures et de l'abdomen (quadriceps et manœuvre du tabouret +++)
    • Atrophie cutanée et sous-cutanée : lenteur à la cicatrisation, peau amincie, ecchymoses au moindre choc, vergetures larges, pourpres, peau du visage érythrosique et congestive avec télangiectasie
  • Signes peu spécifiques :
    • Prise pondérale modérée (10 kg), faciotronculaire
    • Visage arrondi, boufi
    • Comblement des creux sus-claviculaire, bosse de bison, augmentation du rapport taille/hanche
  • Autres :
    • Hyperandrogénie : hirsutisme, séborrhée du visage et du cuir chevelu, acné
    • Œdèmes des membres inférieurs

Autres manifestations

  • Ostéoporose : souvent asymptomatique mais parfois fractures (côtes et vertèbres +++) → ostéodensitométrie
  • Hypogonadisme hypogonadotrope :
    • Femme : spanioménorhée, aménorrhée sans bouffées de chaleur
    • Homme : baisse de la libido, impuissance
  • HTA
  • Troubles psychiatriques : irritabilité, anxiété, insomnie, tendance dépressive, rarement tableau psychotique aigu

Diagnostic biologique

  • Anomalies non-spécifiques :
    • Intolérance au glucose voire diabète
    • Hyperleucocytose à PNN, lymphopénie
    • Alcalose hypokaliémique
    • Hypercalciurie modérée avec risque de lithiase
  • Mise en évidence de la sécrétion excessive de cortisol :
    • Corstiol à 8h augmenté (mais peut être normal)
    • Cortisol libre urinaire augmenté
  • Rupture du rythme circadien :
    • Cortisolémie à minuit augmentée (> 7,2 µg/dL)
  • Perte du rétrocontrôle (cortisol sur ACTH) :
    • Test de freinage minute : cortisolémie le matin à 8h après 1 mg de dexaméthasone la veille à 23h (> 1,8 µg/dL) ; test de 1ère intention
    • Test de freinage faible : cortisol urinaire sur 48h spontanément puis sur 48h avec 2 mg/j pendant 2j de dexaméthasone

Diagnostic étiologique

  • Dosage de l'ACTH
    • ↓ ACTH : origine surrénalienne (adénome ou corticosurrénalome malin) → TDM des surrénales
    • ACTH normale ou ↑ : sécrétion anormale d'ACTH → IRM hypophysaire, freinage fort (8 mg/j de dexaméthasone pendant 2j), test à la CRH et test à la métopirone
    • Si diagnostic incertain à ce stade → cathétérisme des sinus pétreux inférieurs avec injection de CRH (gradient d'ACTH pétro-périphérique important)
Examen Sécrétion ectopique d'ACTH Maladie de Cushing (adénome corticotrope)
IRM hypophysaire Normale Microadénome, rarement macroadénome
Freinage fort Pas de freinage Freinage partiel
Test à la CRH Pas de réponse ↑ ACTH
Test à la métopirone Pas de réponse ↑ ACTH et composé S
  • Eliminer un hypercorticisme fonctionnel (pseudo-Cushing) :
    • Stress intense, dépressions sévères, psychoses, alcoolisme
    • Elévation modérée du CLU, test de freinage minute anormal
    • Test d'hypoglycémie insulinique : persistance d'une réponse de l'axe corticotrope

Découverte devant un tableau d'insuffisance antéhypophysaire

Tableau clinique

  • Présentation caractéristique :
    • Faciès pâle, vieillot
    • Dépigmentation des aréoles mammaires et des organes génitaux externes
    • Peau mince, sèche, froide
    • Rides fines
    • Dépilation complète des aisselles et du pubis
  • Signes d'insuffisance gonadotrope :
    • Homme : ↓ libido, impuissance, pilosité du visage raréfiée, testicules petits et mous, infertilité
    • Femme : aménorrhée, irrégularités menstruelles sans bouffées de chaleur, infertilité, atrophie vagino-vulvaire, dyspareunies
    • Déminéralisation osseuse, risque d'ostéoporose
    • Impubérisme ou retard pubertaire si trouble apparu avant la puberté
  • Signes d'insuffisance corticotrope :
    • Asthénie importante
    • Tendance à l'hypotension
    • Amaigrissement, anorexie
    • Risque d'hypoglycémie (déficit de la néoglucogenèse hépatique)
    • Pas de déficit en aldostérone : pas de perte de sel, d'hyperkaliémie, d'acidose
    • Hyponatrémie de dilution possible, pas d'insuffisance rénale fonctionnelle
    • Risque d'insuffisance surrénalienne aiguë
  • Signes d'insuffisance thyréotrope : hypothyroïdie d'intensité modérée
  • Signes d'insuffisance somatotrope :
    • Adulte : diminution de la masse musculaire, tendance à l'adiposité abdominale, asthénie, risque d'hypoglycémie
    • Enfant : retard de croissance, accidents hypoglycémiques

Bilan hypophysaire fonctionnel

  • Déficit corticotrope :
    • Test à la métopirone : absence d'élévation du composé S
    • Hypoglycémie insulinique : absence d'élévation du cortisol au-delà de 20 µg/dL (contre-indication chez le coronarien et l'épileptique)
    • Cortisolémie à 8h : si > 20 µg/dL, diagnostic éliminé, si < 3 µg/dL, insuffisance surrénalienne avérée
    • Test au Synacthène : normal si cortisol > 20 µg/dL
    • Test à la CRH IV : normal si cortisolémie > 20 µg/dL
  • Déficit thyréotrope : diminution de la FT4 avec TSH normale inadaptée
  • Déficit gonadotrope :
    • Femme avant la ménopause : estradiol bas, FSH et LH normales inadaptées
    • Femme ménopausée : FSH et LH normales inadaptées ou basses
    • Homme : testostérone basse, FSH et LH normales inadaptées, pas d'hyperprolactinémie
  • Déficit somatotrope :
    • Enfant : absence d'élévation de la GH après hypoglycémie insulinique
    • Adulte :
      • Pas d'intérêt des dosages sauf si nécessité de traitement par GH
      • Tests : hypoglycémie insulinique ou test à la GHRH ou à la Clonidine (réponse < 3 µg/dL)
  • Fonction lactotrope : souvent normale ou élevée par déconnexion

Imagerie

  • IRM de la région hypophysaire