90 : Infections naso-sinusiennes de l’enfant et de l’adulte
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Sommaire
Objectifs
- Diagnostiquer une rhino-sinusite aiguë
- Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
Rhinites aiguës
Formes cliniques
- Rhinite aiguë de l'adulte = rhume :
- Evolution épidémique, automne et hiver ++
- Infection virale : rhinovirus, coronavirus, influenza
- Signes généraux : légère fatigue, frissonnement, courbatures
- Signes locaux : rhinopharynx (sécheresse, brûlure) et/ou fosses nasales (prurit, éternuement, rhinorrhée, larmoiement)
- Obstruction nasale unilatérale/bilatérale/à bascule, écoulement séreux, filant, irritant la lèvre supérieure
- Céphalées frontales, sensation de plénitude de la face et des oreilles
- Pas de fièvre
- Rhinoscopie si réalisée : muqueuse rouge, hypertrophie congestive des cornets
- Evolution : en 2 à 3 jours : sécrétions plus épaisses, colorées → quelques jours plus tard : éclaircissement puis tarissement spontané
- Rhinite aiguë du nouveau-né et du nourrisson :
- Enfant < 6 mois → respiration nasale exclusive
- Signes fonctionnels : de la simple obstruction intermittente à la détresse respiratoire néonatale
- Examen des FN : œdème de la muqueuse, cornets tuméfiés
- Diagnostics différentiels : atrésies choanales, hypoplasies des orifices piriformes, malformations faciales
- Rhinopharyngite de l'enfant :
- Respiration buccale bruyante + fièvre < 38,5°C
- Rhinorrhée antérieure mucopurulente bilatérale + rhinorrhée postérieure (tapis de mucopus sur le fond du pharynx)
- Adénopathies cervicales bilatérales inflammatoires, sensibles
- Eliminer une OMA par otoscopie (tympan peut être légèrement congestif)
- Rhinite allergique :
- Présentation proche de la rhinite aiguë mais prédominent au printemps
- Obstruction nasale + rhinorrhée claire abondante + éternuements en salve
- Conjonctivite allergique et prurit palatin souvent associés
- Terrain atopique
- Bilan allergologique à la recherche d'une hypersensibilité spécifique IgE-dépendante
Traitement
- Symptomatique :
- Lavage des fosses nasales, désobstruction rhino-pharyngée
- Antalgiques, antipyrétiques
- Vasoconstricteurs par voie nasale chez l'adulte si obstruction invalidante et en l'absence de contre-indication
- Antibiothérapie non-justifiée
Sinusites aiguës
- 2 voies de propagation :
- Voie nasale à la suite d'une rhinite aiguë (ou barotraumatisme) : pneumocoque, streptocoque, Haemophilus influenzae, Moraxella catarrhalis, staphylocoque
- Voie dentaire secondaire à une infection dentaire : germes anaérobies ++
Formes cliniques
Topographiques
Sinusite maxillaire aiguë
- Signes fonctionnels :
- Douleur unilatérale sous-orbitaire pulsatile, accrue par l'effort et le procubitus, à recrudescence vespérale
- Obstruction nasale ipsilatérale, mouchage épais ± mucopurulent
- Fébricule
- Examen physique :
- Rhinoscopie : pus au méat moyen du côté douloureux
- Douleur provoquée à la pression des points sinusiens
- Rechercher une complication :
- Neuroméningée : syndrome méningé, altération de la conscience
- Ophtalmologique : exophtalmie, œdème palpébral, troubles de la mobilité oculaire, baisse d'acuité visuelle
- Critères diagnostiques pour une surinfection bactérienne :
- Au moins 2 majeurs :
- Persistance ou augmentation des douleurs infra-orbitaires malgré un traitement symptomatique > 48h
- Douleur unilatérale, pulsatile, augmentée lorsque la tête est penchée en avant, acmé la nuit
- Augmentation de l'abondance et de la purulence de la rhinorrhée, surtout si unilatérale
- Mineurs renforcent la suspicion :
- Persistance d'une fièvre après 3 jours
- Obstruction nasale, éternuements, gêne pharyngée, toux persistant plusieurs jours
- Au moins 2 majeurs :
- Examens complémentaires :
- Radiographie standard : uniquement si présomption clinique faible
- TDM sinusienne : si doute diagnostique ou suspicion de complication ; montrera une opacité inhomogène d'un sinus maxillaire
- Penser à rechercher une origine dentaire en cas de sinusite maxillaire aiguë unilatérale sans rhinite
Sinusite frontale
- Douleur frontale, sus-orbitaire
- Parfois céphalée hémicrânienne intense et pulsatile
- Rhinorrhée + obstruction nasale
- Risque élevé de complication
Sinusite sphénoïdale
- Siège douloureux aléatoire (occiput, vertex)
- Nasofibroscopie → écoulement mucopurulent à l'ostium du sinus sphénoïdal
- Diagnostic sur l'imagerie (scanner)
Ethmoïdite aiguë de l'enfant
- Fièvre + œdème palpébral supéro-interne douloureux
- Rare mais à risque de complication → impose une antibiothérapie parentérale en urgence
Forme œdémateuse
- Comblement palpébral supéro-interne, douloureux
- Fièvre à 39-40°C
- Secondaire à une sinusite si :
- Absence de pus conjonctival → élimine une dacryocystite aiguë
- Suppuration nasale unilatérale ± sanguinolente
- Opacité ethmoïdomaxillaire à prédominance unilatérale au scanner
- Traitement antibiotique ambulatoire possible si état général conservé, contrôle clinique à 48h et information des parents sur les signes de gravité
Forme collectée péri-orbitaire
- Collection purulente entre le périoste et l'os planum de l'orbite
- Exophtalmie douloureuse sans trouble visuel ou de la motilité oculaire (possible limitation douloureuse)
- Elimier :
- Ostéomyélite du maxillaire supérieur : œdème prédominant à la paupière inférieure, tuméfaction gingivale et palatine
- Staphylococcie maligne de la face compliquant un furoncle de l'aile du nez ou de la lèvre supérieure
- Erysipèle de la face
Formes compliquées
- 2 complications à rechercher systématiquement :
- Suppuration intra-orbitaire : suspicion si mydriase paralytique, anesthésie cornéenne, ophtalmoplégie partielle ou complète
- Thrombophlébite intracrânienne : fièvre oscillante, frissons, syndrome méningé, atteinte oculo-motrice
- Imposent le drainage chirurgical en urgence :
- Hospitalisation, prélèvements en urgence
- Antibiothérapie parentérale à large spectre double voire triple : C3G + fosfomycine/vancomycine + métronidazole
Formes récidivantes ou traînantes
- Forme récidivante unilatérale → rechercher une cause dentaire ou une cause locorégionale : tumeur, balle fongique, anomalie anatomique
- Forme traînante > 12 semaines = rhinusinusite chronique
- Fréquemment : polypose nasale (anosmie, obstruction, asthme)
- Rechercher un syndrome de Widal
Sinusite bloquée
- Forme hyperalgique de sinusite maxillaire ou frontale
- Douleur intense non-améliorée par le traitement médical
- Ponction du sinus :
- Voie méatale inférieure si maxillaire
- Voie frontale antérieure si frontale (clou de Lemoine)
Formes compliquées
- Oculo-orbitaires : cellulite palpébrale, abcès orbitaire sous-périosté, cellulite orbitaire
- Cérébroméningées : abcès cérébral, méningite, empyème sous-dural, thrombophlébite du sinus caverneux/longitudinal supérieur
- Ostéite frontale
Chez l'immunodéprimé
- Diabétique, HIV+, corticothérapie au long cours, chimiothérapie aplasiante, hémopathie maligne, greffe de CSH, immunosuppresseurs
- Penser aux rhinosinusites aiguës fongiques invasives
Traitement
- Symptomatique : antalgique, antipyrétique, décongestionnants, lavage des fosses nasales
- Antibiothérapie :
- Indications :
- Sinusite maxillaire aiguë bactérienne : si au moins 2 critères majeurs, en cas d'échec d'un traitement symptomatique initial ou sinusite d'origine dentaire
- Sinusite frontale, ethmoïdale ou sphénoïdale systématiquement
- Suspicion clinique de sinusite compliquée : syndrome méningé, exophtalmie, oedème palpébral, ophtalmoplégie, douleurs insomniantes
- Bactéries ciblées : H. influenzae, S. pneumoniae ; forte proportion de souches résistantes
- 1ère intention = amoxicilline + acide clavulanique 1g*3/j 7 à 10 jours
- Alternatives : C2G, pristinamycine si allergie aux β-lactamines 5 jours
- Eviter les fluoroquinolones sauf situation à risque de complications graves (sinusites frontales/sphénoïdales, échec d'un premier ATB sur sinusite maxillaire) après documentation
- Indications :
- Corticothérapie en cure courte (0,8 mg/kg/j pendant 3 jours)
- Pas d'AINS