149 : Tumeurs cutanées, épithéliales et mélaniques : Différence entre versions

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**Stade II (localisé avec risque de rechute) : examen clinique complet ± échographie des aires ganglionnaires suspectes
 
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**Stade III (atteinte ganglionnaire régionale) : examen clinique, échographie des aires ganglionnaires atteintes
 
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*Dépistage et prévention :
 
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**Prévention primaire : information sur les risques liés à l'exposition solaire, réduction de l'exposition solaire (enfants +++)
 
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Version du 6 mai 2014 à 14:06

Objectifs

  • Diagnostiquer une tumeur cutanée, épithéliale ou mélanique
  • Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient

Carcinomes cutanés

Epidémiologie

  • Cancers les plus fréquents de l'adulte
  • Histoire naturelle :
    • Phase d'initiation par un agent carcinogène → accumulation d'événements génétiques mutagènes
    • Phase de promotion et de progression favorisée par les cocarcinogènes : UV, immunosuppression, HPV
  • Rarement avant 40 ans
  • Facteurs de risque :
    • Age avancé
    • Exposition solaire (UV) : exposition chronique et cumulée (CE)/intenses intermittentes dans la première partie de la vie (CBC)
    • Phototype génétiquement déterminé : peaux claires (I et II) plus à risque que les peaux foncées (IV et V)
    • Autres affections génétiques : xeroderma pigmentosum, épidermodysplasie verruciforme, naevomatose basocellulaire
    • Immunosuppressions acquises : HIV +++, transplantés
    • Infections à HPV
    • Radiations ionisantes
    • Dermatoses inflammatoires : lupus cutané
    • Plaies chroniques : ulcères ++, brûlures
    • Exposition à des carcinogènes chimiques : arsenic, goudron, tabac

Diagnostic

Carcinome épidermoïde

  • Lésions précancéreuses :
    • Cutanées = kératoses photo-induites :
      • Kératose actinique, kératose sénile
      • Sur les zones photoexposées : lésions squameuse/croûteuses, multiples, ± érythémateuses, fines rugosités saignant facilement au grattage
      • Coexistence fréquente avec un authentique CE
      • Accessibles à un traitement : cryothérapie, photothérapie dynamique, électrocoagulation, laser CO2, 5-fluorouracile en application locale ou imiquimod en crème
    • Muqueuses = leucoplasies :
      • Kératinisation de la muqueuse par exposition aux UV ou au tabac
      • Lésions blanchâtres, bien limitées, asymptomatiques, ne saignant pas au contact
      • Accessibles à un traitement : chirurgie, électrocoagulation, laser CO2
      • Importance de l'arrêt du tabac
      • Autres atteintes rares : lichen scléreux génital, lichen érosif buccal
  • Carcinome in situ :
    • Autres dénominations : carcinome intraépithélial, maladie de Bowen
    • Pas de franchissement de la membrane basale
    • Au niveau cutané :
      • Lésion unique en zone photoexposée
      • Plaque érythémateuse ± pigmentée et squameuse/croûteuse, bien limitée, à bordure festonnée
    • Au niveau muqueux :
      • Lésion unique, plane, peu infiltrée, rosée et parcourue de plages pigmentées
      • Chez l'homme : érythroplasie de Queyrat (érythème du gland)
      • Infiltration ou ulcération signent l'invasivité → potentiel métastatique
  • Carcinome épidermoïde primitif invasif :
    • Terrain : homme, > 60 ans
    • Lésion croûteuse, jaunâtre, indurée, ulcération centrale
    • Lésion végétante ou bourgeonnante
    • Au niveau cutané ou muqueux (à rechercher)
    • Biopsie systématique
    • Histologie : prolifération de kératinocytes de grande taille organisés en lobules ou travées ± anastomosées, mal limitées, envahissant ± le derme et l'hypoderme ; nombreuses mitoses et atypies cellulaires
  • Bilan d'extension :
    • Recherche clinique d'autres carcinomes associés
    • Palpation des aires ganglionnaires
    • Si CE primitif à risque important de métastase : échographie locorégionale de la zone de drainage
    • RXT + écho abdo/TDM TAP uniquement si atteinte ganglionnaire avérée

Carcinome basocellulaire

  • Age > 50 ans
  • Facteurs de risque : exposition solaire intermittente aiguë dans l'enfance, phototype clair
  • Zones photoexposées (peau uniquement)
  • Aspect général : lésion perlée, papule arrondie ou translucide, télangiectasies
  • Formes cliniques :
    • CBC nodulaire : tumeur ferme bien limitée pouvant simuler une lésion kystique, d'extension centrifuge (la plus fréquente)
    • CBC superficiel : plaque érythémato-squameuse bordée de perles, s'étendant progressivement
    • CBC sclérodermiforme : cicatrice blanchâtre, mal limitée et atrophique
  • Risque d'ulcération ou de pigmentation (diagnostic différentiel mélanome)
  • Biopsie systématique
  • Histologie : amas de kératinocytes issus de la zone basale, petites cellules basophiles à limites nettes avec disposition en palissade ± fibrose du derme

Traitement

Chirurgie

  • 1ère intention
  • A la fois diagnostique et curative : biopsie-exérèse large d'emblée
  • Selon la lésion : sous AL avec suture ou sous AG en 2 temps avec reconstruction
  • Indication d'une biopsie préalable :
    • Diagnostic clinique incertain : suspicion de tumeur maligne, lésion chronique ne répondant pas à un traitement topique
    • Diagnostic clinique certain : lésion non accessible à un traitement chirurgical, zone de rançon esthétique importante, grande taille, geste chirurgical complexe
  • Reprise si exérèse incomplète

Autres

  • Maladies inopérables après biopsie
  • Radiothérapie
  • Traitements locaux pour les CBC superficiels : cryochirurgie, photothérapie dynamique, imiquimod
  • CE de grande taille : chimiothérapie de réduction tumorale avant opération
  • Chimiothérapie pour les CE inopérables
  • CE métastatiques :
    • RCP
    • Exérèse chirurgicale si possible
    • Radiothérapie adjuvante à discuter
  • Traitement palliatif si métastases à distance

Suivi

  • Suivi annuel à vie
  • Dépister :
    • Récidive locale
    • Nouveau CBC/CE
    • Mélanome

Prévention

  • Eviter l'exposition solaire
  • Eviter les lampes à UV
  • Limiter l'exposition solaire dans l'enfance, surtout pour les phototypes clairs
  • Application d'écrans solaires

Evolution

Carcinome épidermoïde

  • Risque d'agressivité
  • Facteurs de mauvais pronostic :
    • Cliniques :
      • Localisation : nez, visage, muqueuses, CE sur cicatrice/ulcère/radiodermite
      • Taille (> 2 cm)
      • Invasion locale
      • Récidive locale
      • Immunodépression
    • Histologiques :
      • Epaisseur > 3 mm
      • Invasion dépassant le derme profond
      • Cellules peu différenciées
      • Infiltration périnerveuse
      • Formes histologiques à haut risque
  • Principaux risques :
    • Agressivité locale
    • Récidive (7%)
    • Métastase à distance : lymphatique voire hématogène

Carcinome basocellulaire

  • Ne métastase jamais
  • Risques : récidive et extension locorégionale
  • Formes avancées : destruction à l'origine de douleurs, saignements, surinfection, destruction des structures de voisinage
  • Facteurs de mauvais pronostic :
    • Extrémité céphalique
    • CBC sclérodermiforme
    • Taille > 2 cm
    • Récidive

Tumeurs à papillomavirus

Physiopathologie

  • HPV :
    • > 120 génotypes caractérisés
    • Infection des kératinocytes de la couche basale à l'occasion d'une effraction épithéliale
    • Réplication virale utilisant la prolifération de la cellule hôte → cytopathogène sur les kératinocytes = koïlocytes
    • Persistance à l'état quiescent épisomal de l'ADN viral libre
    • Intégration dans le génome cellulaire → risque oncogène
    • HPV à haut risque oncogène : 16 et 18 ++
  • Oncogénicité nécessite d'autres facteurs : tabac, immunosuppression, HIV
  • Verrues cutanées :
    • 10% de la population générale, enfants scolarisés et adultes jeunes ++
    • Transmission favorisée par les microtraumatismes et la fréquentation des piscines/salles de sport
    • Parfois exposition professionnelle : bouchers, vétérinaires, abattoirs, poissonniers
  • Condylomes :
    • Adultes jeunes
    • Portage asymptomatique au niveau génital
    • Transmission sexuelle +++ ou non sexuelle (linges humides contaminés, accouchement)
  • Chez l'immunodéprimé :
    • Infections plus fréquentes et plus graves
    • Corrélation à la durée et à la profondeur de l'immunodépression
    • Suivi dermatologique chez les transplantés d'organes
    • Risque néoplasique important chez le sujet HIV+

Diagnostic

Lésions cutanées

  • Verrues plantaires :
    • Myrmécie (HPV1) : verrue profonde, douloureuse à la pression, unique ou quelques unités, circonscrite par un anneau kératosique, piqueté micro-hémorragique
    • Verrues en mosaïque (HPV2) : moins fréquente, indolore, multiples verrues regroupées en placard kératosique
  • Verrues vulgaires :
    • Face dorsale des mains et des doigts
    • Surélévations de quelques mm, surface hémisphérique ou aplatie hérissée de saillies villeuses kératosiques ± sillons
    • Possibilité d'altérations unguéales si développement périunguéal
    • Verrues filiformes parfois : visage, cuir chevelu, cou (barbe ++)
  • Verrues planes communes :
    • HPV3
    • Visage, dos des mains, membres
    • Petites papules jaunes, brunes ou chamois, surface lisse ou mamelonnée
    • Possibilité de régression spontanée

Lésions muqueuses

  • En cas de lésion génitale, colposcopie ou péniscopie systématique (acide acétique) à la recherche de lésions associées (examen proctologique si lésions anales)
  • Pas de biopsie sauf : doute, koïlocytes au frottis vaginal, lésion suspecte
  • Condylomes acuminés (crêtes de coq) : masse charnue hérissée de verrucosité kératosiques
  • Condylomes plans : macules isolées/en nappes, couleur rosée, révélées par l'application d'acide acétique, limitation franche avec la muqueuse saine
  • Néoplasies intraépithéliales :
    • Lésions précancéreuses, risque de carcinome épidermoïde invasif
    • Néoplasies intraépithéliales cervicales (CIN) I à III, précurseurs du cancer du col utérin
    • Autres : néoplasies intraépithéliales vulvaires, anales, pénienne

Formes particulières

  • Condylomes géants de Buschke-Löwenstein : forme rare, aspect tumoral inquiétant mais bénin à la biopsie
  • Papulose bowénoïde : multiples lésions ± confluentes, roses/brunes, à surface ± lisse, squameuses ou kératosiques, d'évolution chronique
  • Chez la femme :
    • Condylomes vulvaires : grandes/petites lèvres, clitoris, vestibule
    • Imposent examen gynécologique et anal complet
    • Risque de co-infection à HPV à haut risque oncogène → frottis cervical ++
    • Recherche de condylome plan : colposcopie + acide acétique/Lugol
  • Chez l'homme : lésions fréquentes de la face interne du prépuce, sillon et frein balano-préputiaux
  • Chez l'enfant : contamination manuportée par verrues vulgaires ou linge domestique mais discuter sévices sexuels

Diagnostic différentiel

  • Verrue plantaire :
    • Durillon : frottement chronique sur un relief osseux avec chaussure trop serrée
    • Cicatrice fibreuse
    • Granulome sur corps étranger
  • Verrues périunguéales persistantes : carcinome in situ
  • Condylomes acuminés :
    • Hyperplasie des papilles de la couronne du gland
    • Papillomatose vestibulaire vulvaire physiologique
    • Syphilides secondaires végétantes
    • Carcinome in situ

Traitement

Verrues cutanées

  • Régression spontanée fréquente → éviter l'acharnement thérapeutique
  • Prévention :
    • Eviction des situations à risque : piscines, salles de sport, linges humides contaminés
    • Vernis incolore à la surface des verrues lors des séances de sport pieds nus
    • Soins d'hygiène simple
    • Surveillance dermatologique systématique des patients immunodéprimés
  • Traitement curatif :
    • Destruction chimique par kératolytiques : simple, indolore, préparations à base d'acide salicylique
    • Cryothérapie : azote liquide après décapage au bistouri ; douloureux
    • Laser CO2 sous AL, risque de cicatrice
    • Pas de traitement agressif chez l'enfant

Condylomes

  • Information du patient sur le risque de transmission sexuelle et d'infection à HPV oncogène
  • Examen des partenaires, recherche d'autres IST
  • Prévention :
    • Vaccination
    • Rapports protégés pendant le traitement des condylomes
  • Traitement curatif :
    • Cryothérapie et laser CO2
    • Electrocoagulation sous AL
    • Podophyllotoxine : résine naturelle en application locale, indolore, 3 semaines, contre-indiquée chez l'enfant et la femme enceinte
    • Imiquimod : traitement immunomodulateur capable d'induire la production de cytokines antivirales ; application 3 fois pendant 16 semaines
  • Situations particulières :
    • Grossesse : risque de recrudescence, de papillomatose laryngée de l'enfant par transmission MF → traitement par laser CO2 au début du 3ème trimestre
    • Enfants : discuter des sévices sexuels

Mélanomes

Physiopathologie

  • Risque lié à l'exposition solaire :
    • Expositions intermittentes et intenses dans l'enfance +++
    • Expositions chroniques cumulatives pour les mélanomes de Dubreuilh
  • Facteurs génétiques :
    • Contexte familial : 2 personnes au moins atteintes de mélanome dans une famille
    • Rôle direct de gènes suppresseurs de tumeur
    • Rôle indirect de la transmission génétique du phototype et du syndrome du nævus atypique
  • Facteurs de risque :
    • ATCD familiaux et personnels de mélanome
    • Phototype clair
    • Nombre élevé de nævi
    • ATCD de coups de soleil
  • Extension biphasique :
    • Horizontale intraépidermique
    • Verticale avec envahissement du derme et de l'hypoderme

Diagnostic

Clinique

  • Critères ABCDE :
    • Asymétrique
    • Bords irréguliers
    • Coloration hétérogène
    • Diamètre > 6 mm
    • Evolution récente documentée
  • Autres signes évocateurs : prurit, saignement au contact
  • Signe du vilain petit canard : nævus différent des autres chez le sujet âgé
  • Biopsie exérèse systématique

Histologie

  • Affirme la nature mélanocytaire
  • Affirme la malignité
  • Préciser si l'exérèse est complète ou non
  • Grade histopronostique = indice de Breslow selon épaisseur tumorale de la couche granuleuse à la cellule la plus profonde

Classification

  • Mélanomes avec phase d'extension horizontale :
    • Mélanome superficiel extensif (SSM) : croissance intraépidermique horizontale puis verticale
    • Mélanome de Dubreuilh : zones photoexposées, personne âgée, évolution longtemps horizontale
    • Mélanome acral lentigineux : paumes, plantes, bords latéraux des doigts/orteils, ongles
    • Mélanome des muqueuses
  • Mélanomes sans phase d'extension horizontale :
    • Mélanome nodulaire d'emblée

Diagnostic différentiel

  • Tumeurs mélanocytaires : nævus cliniquement atypique
  • Tumeurs non mélanocytaires :
    • Kératose séborrhéique : surface mate, bords nets, petits grains blanchâtres
    • Carcinomes basocellulaires pigmentés : aspect perlé
    • Histiocytofibromes pigmentés : pastille indurée à la palpation
    • Angiomes thrombosés
  • Exérèse et histologie au moindre doute

Prise en charge

  • Premier temps systématique = biopsie exérèse de la lésion complète jusqu'au fascia
  • Bilan d'extension fonction du stade :
    • Stade I (localisé à faible risque évolutif) : examen clinique complet (peau, muqueuses, aires ganglionnaires)
    • Stade II (localisé avec risque de rechute) : examen clinique complet ± échographie des aires ganglionnaires suspectes
    • Stade III (atteinte ganglionnaire régionale) : examen clinique, échographie des aires ganglionnaires atteintes
    • Stade IV (métastase > 1er relais ganglionnaire régional) : discuter imagerie selon contexte
  • Dépistage et prévention :
    • Prévention primaire : information sur les risques liés à l'exposition solaire, réduction de l'exposition solaire (enfants +++)
    • Prévention secondaire : dépistage précoce par examen clinique régulier, information de la population sur les signes devant faire consulter
  • Radio/chimiothérapie jamais indiquées au stade local
  • Après exérèse chirurgicale large, rarement, traitement adjuvant par IFNα discuté au cas par cas en cas d'atteinte ganglionnaire
  • Suivi prolongé :
    • Examen clinique tous les 6 mois pendant 5 ans puis tous les ans (plus rapproché si stades avancés)
    • Education à l'autodépistage
    • Echographie de la zone de drainage lymphatique optionnelle

Evolution

  • Risques :
    • Récidive
    • Métastases en transit (cutanées), ganglionnaires et viscérales
    • Survenue d'un second mélanome primitif
  • Facteurs pronostiques :
    • Au stade de tumeur primaire isolée :
      • Précocité du diagnostic et de l'exérèse
      • Indice de Breslow élevé
      • Ulcération
      • Index mitotique élevé
      • Sexe masculin, âge avancé
      • Localisation : tronc, tête, cou
    • Au stade d'atteinte ganglionnaire clinique :
      • Nombre de ganglions métastatiques
      • Epaisseur tumorale initiale et ulcération
    • Au stade de métastase à distance :
      • Pronostic très sombre
      • LDH sériques élevés

Naevi

Physiopathologie

  • Nævus commun : tumeur bénigne acquise mélanocytaire (mélanocytes regroupés en amas ou en thèques dans l'épiderme ou le derme)
  • Phénomènes malformatifs : nævi congénitaux, hamartomes congénitaux, mélanoses dermiques (tache mongoloïde, nævus d'Ota)
  • Formes anatomopathologiques :
    • Nævus jonctionnel : disposition éparse dans la couche basale
    • Nævus dermique : prolifération mélanocytaire strictement intradermique
    • Nævus mixte : dans le derme et la jonction dermo-épidermique
  • Histoire naturelle d'un nævus commun :
    • Apparition à partir de l'âge de 4 ans
    • Augmentation en nombre et en taille
    • Plateau vers 40 ans puis régression (rares après 60 ans)
    • Dans l'enfance, prédominance de lésions planes
    • Chez l'adulte, majorité de lésions du tronc ou du visage avec aspect tubéreux (en relief)
    • Croissance des nævi parallèle à celle de la peau (adolescence, grossesse)

Diagnostic

Formes symptomatiques

  • Nævus commun :
    • Pigmentés : teinte brune, taille < 1 cm, plan (jonctionnel) ou mollusciforme (mixte ou dermique)
    • Tubéreux : peu pigmenté, visage ++, mixte ou dermique
  • Selon la pigmentation :
    • Bleue : nævus de localisation profonde ; lésion plane ou saillante, âge adulte ++
    • Achromique : type tubéreux ++ parfois centré par un poil
  • Nævus cliniquement atypique :
    • Grande taille > 5 mm
    • Couleur rosée ou brune
    • Caractéristiques proches des mélanomes : asymétrie des bords, forme irrégulière, coloration hétérogène
    • Histologiquement : type jonctionnel
    • En cas de NCA nombreux, sujets sont plus à risque de développer un mélanome
    • Mais les NCA ne dégénèrent qu'exceptionnellement en mélanome
    • Parfois formes héréditaires
    • Pas d'exérèse systématique sauf doute avec mélanome

Formes topographiques

  • Nævus du lit de l'ongle :
    • Mélanonychie en bande
    • Eléments évocateurs de mélanome : modification récente, caractère monodactylique
  • Nævi des muqueuses, des paumes, des plantes

Formes évolutives

  • Lésions congénitales :
    • Hamartomes pigmentaires : lésion localisée, surface devient progressivement irrégulière avec hypertrichose
    • Nævus congénital géant suivant une distribution métamérique
    • Tache mongoloïde = nævus bleu congénital, fréquent chez les enfants africains/asiatiques
    • Nævus d'Ota : unilatéral, sur le territoire des 2 branches supérieures du trijumeau, avec atteinte possible de la sclérotique et de la conjonctive
  • Phénomène de Sutton :
    • Halo achromatique circulaire autour de nævi pigmentés
    • Aboutit à la disparition progressive mais totale des lésions en question
    • Rassurer le patient sauf si survenue après 40 ans

Formes compliquées

  • Traumatismes :
    • Pas de risque de transformation maligne en cas de microtraumatismes répétés
    • Possibilité d'exérèse à titre de confort
    • Saignement spontané est suspect
  • Folliculite sous-nævique :
    • Favorisée par un traumatisme
    • Nævus inflammatoire, sensible
    • Régression spontanée

Diagnostic différentiel

  • Lentigos de petite taille : macules pigmentées de quelques mm, teinte uniforme, zones exposées
  • Ephélides : macules brun clair s'accentuant avec le soleil
  • Histiocytofibrome : consistance dure à la palpation
  • Kératose séborrhéique : tumeur épithéliale bénigne, lésion pigmentée, âge > 40 ans
  • CBC nodulaire pigmenté : télangiectasies, lésion perlée, zones photoexposées
  • Angiome
  • Mélanome débutant de type superficiel extensif
  • En cas de doute :
    • Examen en épiluminescence avec agrandissement (dermoscopie)
    • Exérèse chirurgicale pour histologie

Prise en charge

Modalités d'exérèse

  • A titre diagnostique : en cas de lésion suspecte
  • A titre fonctionnel ou esthétique : à la demande du patient ; balance bénéfice/risque en fonction de la rançon cicatricielle
  • Exérèse sous AL, au bistouri à lame, avec examen anatomopathologique systématique de la pièce d'exérèse

Mesures spécifiques

  • Nævus congénital :
    • Exérèse discutée au cas par cas, surtout pour les grands nævi congénitaux
    • Surveillance du risque rare de transformation
  • Nævus commun :
    • Pas d'exérèse systématique préventive
    • Pas de surveillance systématique
    • Education à l'autosurveillance des lésions pigmentées
    • Information sur les risques liés à l'exposition solaire excessive

Pronostic

  • Facteurs favorisant la présence d'un grand nombre de nævi :
    • Phototypes
    • Cheveux blonds/roux
    • Teint et yeux clairs
    • Forte sensibilité à l'exposition solaire
    • Immunodépression
  • Risque de transformation :
    • Exceptionnelle pour un nævus commun et congénitaux de petite taille
    • 10% de transformation pour les nævi congénitaux géants
  • Les nævi communs sont des marqueurs de risque de mélanome :
    • Si présents en grand nombre
    • Surtout si grande taille (> 5 mm)
    • Surtout ni nombreux NCA
    • ATCD familiaux de mélanome
    • Surtout si phototype clair